À l’heure du message I = I, comment parler des bienfaits du traitement anti-VIH pour la prévention au-delà des relations sexuelles?

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Le message I=I (indétectable égale intransmissible) est bien passé et est devenu un cri de ralliement pour les personnes et les organisations du monde entier : les personnes suivant un traitement anti-VIH efficace ne peuvent transmettre le virus à leurs partenaires sexuels. Ce message leur a ainsi permis d’avoir des relations sexuelles sans craindre de transmettre le virus, mais il a aussi contribué à combattre la stigmatisation.

Bien que le message I=I ait eu le vent en poupe ces dernières années, le rôle du traitement anti-VIH visant à prévenir la transmission du virus par d’autres voies n’est pas encore bien connu. Ces informations sont importantes pour prendre des décisions éclairées en matière de soins de santé et déstigmatiser le VIH.

On accorde toujours la primauté aux bienfaits du traitement pour la santé

Dès que l’on parle des bienfaits du traitement anti-VIH pour la prévention, il faut se souvenir que ceux-ci sont secondaires par rapport aux bienfaits du traitement pour la santé. Si une personne vivant avec le VIH ne suit pas de traitement, elle devrait d’abord et avant tout se renseigner sur comment le traitement et le maintien d’une charge virale indétectable les aidera à rester en bonne santé. Au lieu d’être la raison principale de l’amorce d’un traitement, la prévention de la transmission à autrui peut être un facteur de motivation supplémentaire chez certains.

Grossesse et traitement anti-VIH

Sans traitement anti-VIH efficace, le virus peut se transmettre d’une personne vivant avec le VIH à son bébé pendant la grossesse et l’accouchement. On estime qu’en l’absence de tout traitement contre le VIH les probabilités que cela se produise se situent entre 15 % et 30 % (information en anglais uniquement).

Cependant, suivre un traitement anti-VIH et maintenir une charge virale indétectable diminue grandement les possibilités de transmission au bébé pendant la grossesse et l’accouchement. C’est une étude française (en anglais) qui nous en fournit les preuves les plus concluantes : dans celle-ci, sur plus de 2500 bébés de mères ayant entamé un traitement avant d’être enceinte, continué leur traitement pendant la grossesse et ayant une charge virale indétectable au moment de l’accouchement, aucun n’est né avec le VIH.

La recherche sur la transmission périnatale n’est pas aussi solide que celle qui démontre les bienfaits du traitement anti-VIH pour la prévention et d’une charge virale indétectable pour la transmission sexuelle; il existe donc certains désaccords quant au message. Certains experts n’hésitent pas à dire que si une personne suit un traitement et maintient une charge virale indétectable pendant toute la durée de sa grossesse, le bébé ne naîtra pas avec le VIH. Cependant, certains experts estiment qu’il n’y a pas assez de preuves pour répondre aussi catégoriquement et déclarent qu’il pourrait y avoir un petit risque de transmission.

Le manque de message cohérent peut prêter à confusion pour certains, mais la distinction est une question de sémantique. Même s’il existe un léger risque de transmission, le fait est que les bébés de personnes qui suivent un traitement, maintiennent une charge virale indétectable tout au long de leur grossesse et ont accès à des soins de grossesse au Canada ne naissent pas avec le VIH. C’est un excellent message pour les personnes infectées par le VIH qui veulent fonder une famille.

Nous savons bien sûr que toute personne vivant avec le VIH ne suit pas dans tous les cas un traitement anti-VIH efficace. Même si une personne n’a pas de charge virale indétectable avant d’être enceinte, entamer le traitement aussi rapidement que possible et maintenir une charge virale indétectable le restant de la grossesse diminuera grandement les probabilités de transmettre le virus au bébé. C’est parce que le VIH est généralement transmis à un stade tardif de la grossesse, ou pendant l’accouchement. Aussi, si le niveau de la charge virale est indétectable tôt pendant la grossesse, les probabilités du bébé d’être atteint du VIH sont très faibles.

De manière générale, le message concernant le traitement anti-VIH pour prévenir le virus pendant la grossesse et l’accouchement est très positif. Pour les personnes souhaitant avoir des enfants, il pourrait être aussi libérateur que le message I=I. Cela signifie que les personnes qui le souhaitent peuvent avoir des bébés sans craindre de transmettre le virus.

Traitement anti-VIH et allaitement (chestfeeding[i])

Sans traitement, on estime que les probabilités de transmettre le VIH pendant l’allaitement se montent à environ 15 %. (en anglais seulement)

Suivre un traitement et maintenir une charge virale indétectable diminue fortement les possibilités de transmettre le VIH pendant l’allaitement, mais il pourrait subsister une faible probabilité de transmission. Au Canada, les directives nationales recommandent que les personnes atteintes du VIH n’allaitent pas leur bébé. À cause de cette recommandation, la plupart des personnes vivant avec le VIH au Canada optent pour les préparations pour nourrissons, et cela afin d’éviter la transmission.

Cependant, certaines personnes ressentent un fort désir d’allaiter, et cela pour des raisons personnelles, sociales, ou culturelles. Dans ce cas, certains experts conviennent (blogue en anglais) qu’elles devraient être sensibilisées au risque de transmission pour pouvoir peser le pour et le contre. Si elles choisissent d’allaiter, elles devraient alors être encouragées par leur médecin à le faire d’une manière qui minimise les probabilités de transmission. Cela entraînera vraisemblablement une surveillance plus fréquente de la charge virale pour le parent et un dépistage du VIH pour le nourrisson. Cela pourrait aussi signifier de donner des médicaments au bébé pendant toute la durée de son allaitement afin de réduire encore plus l’éventualité de la transmission.

Traitement anti-VIH et consommation de drogues

Par comparaison avec la transmission sexuelle et périnatale, nous ne disposons pas d’autant de preuves quant à l’incidence du traitement anti-VIH sur la réduction des risques de transmettre le virus en partageant du matériel servant à la consommation de drogues. Des preuves suggèrent que le risque de transmission est atténué lorsqu’une personne maintient une charge virale indétectable, mais nous ne savons pas dans quelle mesure.

Les personnes qui consomment des drogues ont le droit de connaître les bienfaits du traitement anti-VIH pour la prévention pour réduire le risque de transmission en partageant du matériel servant à la consommation de drogues, même si le risque n’est pas nul. De plus, les personnes qui consomment des drogues ont, elles aussi, des relations sexuelles et des enfants, ce qui signifie que les informations sur les bienfaits du traitement pour la prévention de la transmission sexuelle et périnatale peuvent les autonomiser et également changer le cours de leur vie.

La meilleure manière de prévenir la transmission du VIH consiste à utiliser du nouveau matériel à chaque fois. Les personnes qui utilisent des drogues doivent pouvoir constamment avoir assez de nouveau matériel à disposition pour ne pas avoir à le partager avec d’autres.

Alors que nous continuons de transmettre le message I=I, il importe d’élargir les conversations pour y inclure les bienfaits du traitement anti-VIH pour la prévention, au-delà des relations sexuelles.

 

Mallory Harrigan est spécialiste en connaissances, Dépistage du VIH de CATIE. Elle détient une maîtrise en psychologie communautaire de l’Université Wilfrid Laurier.

 

[i] En anglais, le terme chestfeeding est souvent utilisé par les personnes transgenres qui allaitent leur bébé.

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