La science de l’élaboration des programmes : Pour éliminer les conjectures dans la prévention

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Pour ceux et celles d’entre nous qui travaillons dans le domaine de la prévention du VIH et de l’hépatite C, l’émergence de nouvelles approches de prévention nous oblige de plus en plus à dépendre des données probantes pour prendre des décisions éclairées au sujet des meilleures stratégies à utiliser avec un client ou une communauté en particulier.

La science de l’élaboration des programmes consiste à appliquer de façon systématique les connaissances scientifiques pour améliorer la conception, la mise sur pied et l’évaluation des programmes. Au Canada, elle prend de plus en plus d’importance pour nous aider à faire avancer les mesures de lutte contre le VIH et l’hépatite C.

Il n’est cependant pas toujours facile de déchiffrer la science et de la vulgariser pour que nos collègues et clients comprennent. Nous devrons aussi peut-être nous départir de nos convictions de longue date qui pourraient maintenant ne plus être nécessairement valables lorsque la nouvelle science modifiera la réalité de la prévention, soit par des progrès au plan médical soit par une meilleure compréhension de la façon dont se transmet le virus.

Pensez aux couples sérodifférents, où un partenaire est séropositif et l’autre est séronégatif. Il y a seulement dix ans, les messages de prévention à l’intention des couples sérodifférents proposaient des options très limitées pour réduire le risque de transmission du VIH d’un partenaire à l’autre. Aujourd’hui, grâce à des ressources additionnelles dans la boîte à outils pour la prévention et à une meilleure compréhension de la façon dont la charge virale influence le risque de transmission du VIH, le paradigme change, tout comme nos messages de prévention.

Forts des nouvelles connaissances voulant que le traitement anti-VIH puisse également réduire le risque de transmission du VIH, les praticiens en santé publique ont aussi pu développer de meilleures stratégies de prévention du VIH au niveau de la population. Tout récemment, l’ONUSIDA s’est servi de ces données probantes pour tenir un nouveau discours sur les objectifs mondiaux de traitement du VIH, encourageant ainsi les responsables des politiques à reconnaître les avantages préventifs d’une stratégie 90-90-90 : 90 % des personnes vivant avec le VIH ont reçu leur diagnostic, 90 % des personnes ayant reçu un diagnostic suivent un traitement et 90 % de ces personnes sous traitement ont une charge virale indétectable.

La science de l’élaboration des programmes peut nous aider à atteindre ces objectifs. Au Canada, par exemple, environ 25 % des personnes séropositives ne connaissent pas leur statut et une revue systématique indique que le recours aux tests de dépistage est faible même chez certaines populations ayant un taux élevé d’infection au VIH. Les données probantes concernant différentes approches pour le dépistage du VIH, comme le dépistage rapide du VIH au point de service et le dépistage faisant partie des soins médicaux de routine, peuvent nous aider à améliorer et à élargir nos programmes afin de combler ces lacunes.

De plus, la science de l’élaboration des programmes peut nous faire découvrir les idées et les données probantes provenant de partout au monde pour nous permettre de créer de nouveaux programmes qui n’existent actuellement pas au Canada. Des interventions éprouvées ayant connu du succès à l’échelle internationale, comme les campagnes de santé des hommes gais, les programmes de seringues et d’aiguilles en prison et une Journée nationale de dépistage du VIH, peuvent donner aux responsables de l’élaboration des programmes d’ici les données probantes dont ils ont besoin pour obtenir du financement et du soutien afin de mettre sur pied ces stratégies.

Même si cela peut sembler déconcertant, les données probantes constituent de précieux outils pour toute personne œuvrant dans le domaine de la prévention du VIH et de l’hépatite C. Ces dernières nous aideront à sélectionner les programmes à mettre sur pied, à les rendre plus efficaces et à obtenir du soutien de la part des décideurs souhaitant rentabiliser leurs investissements.

À mesure que la science de l’élaboration des programmes se consolide petit à petit au Canada, et que l’on s’attend de plus à plus à se baser sur les données probantes pour l’élaboration des programmes, CATIE a mis encore plus l’accent dans ce domaine par le biais de publications, comme Point de mire sur la prévention, en y récapitulant et en y interprétant les connaissances afin que les fournisseurs de services puissent trouver les données probantes nécessaires pour élaborer et évaluer leurs programmes.

Zak Knowles est gestionnaire du contenu Web chez CATIE où il veille à maintenir à jour le site Web. Il est également rédacteur de Point de mire sur la prévention. Avant de se joindre à CATIE, Zak a travaillé à la Hassle Free Clinic de Toronto en tant que conseiller VIH.

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