Comprendre les progrès du Canada vers l’atteinte des cibles mondiales en matière de VIH

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L’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) a récemment publié une infographie avec des estimations nationales sur Les progrès du Canada vers l’élimination de l’épidémie de VIH. Ces estimations aident à comprendre l’efficacité des interventions actuelles contre le VIH au Canada et peuvent aider à identifier les domaines à améliorer pour orienter les efforts de prévention et de soins du VIH. Cependant, il peut parfois être difficile de comprendre ce que les estimations veulent vraiment dire. Alors, explorons quelques conseils utiles pour interpréter les données.

Que nous disent les estimations sur le VIH?

Les progrès vers les cibles mondiales 95-95-95 sont évalués en utilisant quatre mesures :

  1. Le nombre estimé de toutes les personnes vivant avec le VIH au Canada;
  2. Parmi celles qui sont estimées vivre avec le VIH au Canada, le nombre et la proportion de personnes qui ont reçu un diagnostic (appelées la première cible);
  3. Le nombre et la proportion de personnes qui ont reçu un diagnostic de VIH et qui suivent un traitement antirétroviral (TAR) (appelé deuxième cible);
  4. Le nombre et la proportion de personnes sous TAR qui ont une suppression virale (<200 copies/ml) (appelée troisième cible).

 D’après les estimations récemment publiées, nous savons qu’au Canada en 2022 :

  • on estimait qu’il y avait 65 270 personnes vivant avec le VIH
  • 89 % des personnes vivant avec le VIH avaient reçu un diagnostic.
  • 85 % des personnes ayant reçu un diagnostic de VIH recevaient un traitement.
  • 95 % des personnes recevant un traitement contre le VIH avaient une charge virale supprimée.

 Le Canada a atteint la 3e cible de « 95 » et est en train de combler l’écart pour les deux premières cibles.

Comment le progrès du Canada vers les cibles mondiales en matière de VIH a-t-il changé depuis 2020?

Il est important de noter que les nouvelles estimations publiées ne peuvent pas être directement comparées aux estimations précédemment publiées pour 2020 (publiées en 2022). Cela est dû au fait que toutes les estimations sont basées sur des modèles mathématiques qui nécessitent certaines hypothèses sur des données inconnues, telles que les personnes atteintes d’un VIH non diagnostiqué. Au fil du temps, nous acquérons des données du monde réel qui nous indiquent à quel point ces hypothèses précédentes étaient exactes, et nous modifions notre méthodologie en fonction des nouvelles informations. Par exemple, avec suffisamment de temps, les provinces et les territoires ont la possibilité de mettre à jour les données primaires avec des informations manquantes ou nouvelles et d’éliminer les doublons. Parce que les nouvelles estimations ont été calculées avec une méthodologie différente des estimations précédentes, les comparer reviendrait à comparer des pommes et des oranges!

Les estimations publiées à l’aide des données et de la méthodologie les plus récentes remplacent toutes les estimations précédentes. Les estimations pour 2020 seront recalculées en utilisant les données les plus récentes de chaque province et territoire, mais ces dernières ne sont pas encore disponibles. Quand les estimations révisées de 2020 seront publiées, nous pourrons comparer les progrès réalisés en 2020 à ceux de 2022… comparer des pommes avec des pommes!

D’autres organisations internationales telles que le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, les Centres de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis, Public Health England, le Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) et l’Institut Kirby en Australie révisent également les estimations précédentes en se basant sur des données actualisées et de nouvelles méthodologies.

Pourquoi le nombre estimé de nouvelles infections par le VIH diffère-t-il des données partagées dans le rapport de surveillance « Le VIH au Canada » de 2022?

Il existe deux types différents de données épidémiologiques disponibles. Ils peuvent sembler similaires, mais ils ont des différences importantes. Les estimations sur le VIH provenant du rapport sur Les progrès du Canada vers l’élimination de l’épidémie de VIH fournissent une vue d’ensemble qui représente toutes les personnes qui, selon nos estimations, vivent avec le VIH (cas diagnostiqués et non diagnostiqués), tandis que les rapports de surveillance fournissent des informations sur le nombre de personnes ayant reçu un diagnostic de VIH au cours de l’année civile en question.  

Par exemple, les estimations montrent qu’environ 1 848 nouvelles infections ont eu lieu au Canada en 2022. Ce chiffre représente toutes les personnes qui ont acquis le VIH cette année-là, qu’elles aient reçu un diagnostic ou non. Alors que dans le rapport de surveillance, il y avait 1 833 nouveaux cas diagnostiqués en 2022, ce qui représente uniquement celles qui ont reçu un diagnostic positif d’un test de dépistage du VIH cette année-là.

Le nombre dans le rapport de surveillance ne comprend pas les cas non diagnostiqués et inclut les personnes qui ont contracté le VIH les années précédentes, mais qui ont reçu leur diagnostic seulement en 2022. Donc, les diagnostics signalés de VIH ne reflètent pas réellement l’incidence du VIH (ou une nouvelle infection) cette année-là.

Comment l’ASPC parvient-elle à estimer le nombre de personnes vivant avec le VIH qui n’ont pas encore reçu de diagnostic?

Il est impossible de connaître le nombre exact de personnes qui ont contracté le VIH et n’ont pas encore été testées, mais nous sommes en mesure d’estimer un nombre approximatif.

Les données de surveillance sur les nouveaux diagnostics et les données des tests de laboratoire spécialisés, ainsi que les hypothèses du modèle mathématique, sont utilisées pour estimer combien de personnes ayant récemment obtenu un diagnostic ont probablement contracté le VIH récemment, par rapport à celles qui pourraient vivre avec le VIH depuis un certain temps sans en être conscientes. Cela nous donne des informations sur le nombre de personnes atteintes d’un VIH non diagnostiqué, ce qui nous permet ensuite de mieux comprendre la proportion estimée de personnes vivant avec un VIH non diagnostiqué chaque année. Ces informations sont combinées à d’autres données sur les décès et la migration, ce qui nous permet d’estimer le nombre total de personnes vivant avec le VIH au Canada.

La méthodologie utilisée au Canada est similaire à celle utilisée en Europe, aux États-Unis et en Australie.

Pourquoi l’ASPC publie-t-elle les estimations de 2022 en 2024?

Les estimations du VIH sont élaborées à partir d’une gamme de données provenant des provinces et des territoires. Comme chaque province et territoire a sa propre approche de déclaration, les données doivent être normalisées avant de pouvoir être combinées pour produire des estimations au niveau national. La collecte et la préparation des données peuvent prendre du temps, c’est pourquoi des estimations sont publiées pour 2022, car c’est l’année la plus récente pour laquelle des données complètes sont disponibles.

Comment la pandémie de COVID-19 a-t-elle eu une incidence sur les estimations?

La pandémie de COVID-19 a eu de nombreuses incidences, connues et inconnues, sur l’accès aux services de dépistage, de prévention et de soins du VIH, ainsi que sur les activités de surveillance au Canada. Pour cette raison, les données pour 2020 à 2022 doivent être interprétées avec prudence. Les répercussions réelles et les effets durables de la pandémie de COVID-19 sur la transmission du VIH au Canada pourraient devenir plus clairs avec la poursuite de la collecte et de l’analyse des données de surveillance du VIH dans les années à venir.

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